Elections au conseil communautaire ou le jeu des anomalies

Le lundi 14 avril 2014, à Lévignen, Benoît Haquin (maire de Brégy) est élu, sans surprise, président du conseil communautaire de la Communauté de Communes du Pays de Valois (CCPV). Il était le seul et unique candidat !

1ère anomalie : La Présidence du Pays de Valois revient à un élu d’une petite commune du Multien. Détail anodin mais d’importance. Historiquement, les paroisses du Multien, globalement toutes les communes au sud de l’actuelle RN2 sur le territoire, dépendait jadis de l’évêché de Meaux. Faut-il alors voir, dans l’élection de M. Haquin, agriculteur, un signe d’allégeance politique à Jean-François Copé (UMP) et un déplacement du centre de gravité de notre baronnie en guise de retour en arrière ?

2ème anomalie : Philippe Boulland (eurodéputé UMP sortant) affirme avoir été trahi (Le parisien du 22 avril). Battu avec Colette Thellier dans son propre fief, à Betz, par Marc Grandemange, un candidat (SE)*, lors des élections municipales, le conseiller général du canton est écarté de la dernière vice-présidence de la CCPV par Benoît Proffit, agriculteur, maire (SE)* de Mareuil-sur-Ourcq. Le canal de l’Ourcq nous sépare fort heureusement du département voisin de la Seine et Marne. Que signifie politiquement cette mise à la diète du docteur Boulland par ses propres amis de droite ? Encore un problème d’allégeance.

3ème anomalie : On pouvait espérer une candidature de principe parmi les rares élus de gauche à la présidence du conseil communautaire alors même que le mode de désignation devenait théoriquement plus favorable à l’opposition. Il fallut finalement se contenter d’une petite prise de parole de circonstance de la part de Jean-Paul Douet (conseiller général socialiste du canton de Nanteuil-le-Haudouin) pour rappeler simplement aux nouveaux venus sa qualité de Vice-Président du conseil général de l’Oise ! Mais, par miracle, Fabrice Dalongeville, maire radical de gauche d’Auger St Vincent, enlève la cinquième vice-présidence chargée du tourisme. Comme quoi, le glissement à droite de la société française, peut aussi avoir, pour certains, des effets d’aubaine. Monsieur Dalongeville que sa famille politique rattache à la défense des valeurs de laïcité est visiblement mieux récompensé par ses adversaires du lobby agricole que le docteur Boulland.

4ème anomalie : Bruno Fortier, le nouveau maire (SE)* de Crépy-en-Valois, se contente lui de la première Vice-présidence de la CCPV. Faut-il y déceler une marque de modestie de la part de l’admirateur de l’abbé Pierre ? Ne nous laissons surtout pas embobiner par la bonhommie tout en rondeur du personnage. Le premier Vice-Président sera en charge des questions de l’urbanisme. Les Maires vont prochainement perdre la main sur les permis de construire dans leur commune. Cette compétence va bientôt échoir aux communautés de communes dans le cadre des lois de décentralisation. Bien vu.

Chacun son métier et les vaches seront bien gardées. Tout montre dans cette élection communautaire que le bon sens paysan est encore bien ancré dans notre bon pays de Valois (-Multien). Les vieilles pratiques politiques et les petits arrangements entre notables du cru n’ont pas vraiment cessé en ce début de 21ème siècle. Mais est-ce une raison suffisante pour renoncer et mettre dans la poche ses convictions de gauche ? Pour sûr, les grands oligarques qui tirent vraiment les ficelles tout en haut de la société doivent se frotter les mains. Le vieux monde n’est pas prêt de changer.

Gérard Lefèbvre

*(SE) est un label électoral qui signifie sans étiquette. Ce procédé qui ne trompe personne vise à décomplexer l’électeur et l’autorise le cas échéant à un vote contraire à ses convictions habituelles.